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Loge de Recherche Laurence Dermott

Rechercher dans la Fraternité et la Tolérance.

Puissance du Manichéisme et émergence de la pensée Chaldéenne en France (Les Mages templiers)

Publié le 13 Décembre 2012 par Issac Ben Jacob in Gnose

    
A1- Des Origines du Manichéisme et du Catharisme
 

Manès fut sans doute le plus redoutable et le plus inspiré de tous les hérésiarques, car c’est de lui dont on dit que toutes les hérésies se sont nourries et que pour la première fois, elles reçurent ordonnancements et justifications. Mais il est fort peu aisé de savoir quel fut le premier auteur de la doctrine dualiste qui plaisait tant aux philosophes orientaux. Les Mages de Perse semblent toutefois s’être, les premiers, attribué cette pensée, et d’aucuns déclarent qu’ils la détenait des Hittites, sorte d’arabes palestiniens. Ces derniers ayant infiltré par le jeu des alliances des tribus juives, et par ce biais détourné le savoir Biblique. D’autres ajoutent que l’hérésie est plus ancienne encore. Ses racines plongeraient jusqu’au temps d’Abraham, et celle-ci aurait résulté de cette promiscuité des Hébreux avec les Chaldéens. Quoiqu’il en soit, la chose est certaine, pour qu’une hérésie prenne naissance, il faut bien qu’à l’origine les hérétiques se soient inspirés de la véritable doctrine Biblique. Et c’est ensuite seulement qu’il convient de supposer un détournement. Ainsi donc il serait plus juste de dire que cette hérésie s’est enrichie et a pris forme suivant plusieurs étapes : Une première émergence serait donc à supposer au temps d’Abraham, une seconde lors de la pénétration des Hittites dans certaines tribus du peuple Hébreu, la troisième enfin s’étant nourrie de la captivité des Juifs à Babylone, et des secrets ainsi extorqués à des Lévites. Nous en voulons pour preuve qu’il était alors interdit aux Juifs de lire certains livres Saints de peur que les Mages ne comprennent et ne détournent leur contenu.
Mais la chose reste obscure, et nous nous en tiendrons donc à Manès. Celui-ci naquit en Perse l’an 240, et selon les historiens ecclésiastiques, encore fort jeune, il fut acheté par une veuve fortunée qui le fit instruire par un arabe nommé Scythien, ou de son disciple Buddas (buddha). Manès s’imprégna de leur système et recueillit leurs idées pour mieux les « parfaire ». Toutefois, notons que de la bouche des orientaux, ses débuts ne nous sont pas contés de la même manière. Ces derniers nous déclarent en effet que Manès était mage d’origine et avait vécu dans la religion de Zoroastre. Quoi qu’il en soit, il est certain que ce personnage fut grandement instruit. On dit qu’il étudia la géométrie, l’astronomie, la médecine, et que gorgé de tout ce savoir, la lumière éclaira brusquement son regard et qu’il en fut conduit à embrasser le Christianisme. Ayant, semble-t-il été élevé au sacerdoce, il entreprit de réformer le Christianisme en « l’enrichissant » de la doctrine des mages.

Manès pris dès lors exemple sur d’autres hérétiques plus anciens parmi lesquels, Basilide, Valentin, Bardesanes, et Marcion l’apostat, et chercha désormais dans les écritures saintes tout ce qui pouvait asseoir ses opinions. Un soir, au détour d’une nuit agitée, et à la lueur de torches crépitantes, Manès, plongé dans de profondes méditations nocturnes, crut déceler dans la Bible, la confirmation que Dieu n’avait point tout pouvoir. Soudainement inspiré, il vit au travers des écritures, que le démon y était nommé « puissance des ténèbres », « prince de ce monde », enfin « auteur et père du péché ». Encore haletant et tout ému de cette découverte, il conclut que Dieu était limité par la sphère du démon, et que ce dernier s’était donné naissance à lui-même. C’est alors qu’il déclara publiquement que de Dieu ne pouvait venir le mal, et que le démon était un principe autonome d’une puissance inouïe, non créé. Il soutint ensuite que l’Ancien Testament était l’œuvre du diable, et ne devait point être reconnu comme juste, mais seulement le nouveau.
Comme à toute religion nouvelle il faut un Messie nouveau, Manès, qui se sentait pénétré d’une force surnaturelle se prétendit être ce Paraclet qui avait été annoncé par le Christ à ses Apôtres. Il déclara : « C’est moi le consolateur, c’est moi, Manès qui suis cet envoyé du ciel, ce prêcheur mystérieux prédit par le Christ. » Ses disciples devinrent fort nombreux, et ses prêches l’emmenèrent de plus en plus loin. C’est ainsi qu’éloigné de sa patrie, il rencontra un jour Archélaüs, évêque de Charcar en Mésopotamie. Quelques disputes s’étant élevées, les deux hommes décidèrent de se mesurer l’un, l’autre, et tinrent débat. Archélaüs en cette année 227, démontra donc aux disciples de Manès, et à lui-même, que ce dernier n’avait point de mission divine à remplir, et que sa doctrine contredisait directement les Ecritures.

Certains en ce temps, et pour rendre témoignage de ce qui s’était passé en ce lieu, retranscrirent les actes de ces débats. Il semble d’ailleurs que la réfutation de cette hérésie connut un large succès, car nous en possédons encore le texte. (Zacagni, collectan, monum, vet, eccl graecae et latinae in 4 romae 1698) Notons que Socrate s’inspira de ces débats pour tirer un portrait de Manès, et que Saint Cyrille de Jérusalem les a de même consultés pour réfuter les opinions contraires au Catholicisme. Quoi qu’il en soit, Manès, furieux, et confus d’avoir été victime du peu de succès de sa théorie, s’en retourna en Perse. Mais la force de son esprit ne s’était point éteinte, et toujours confiant en sa destinée, il se rendit près de Sapor, Roi des Perses. Il instruisit le Monarque, et l’incita à plus de confiance et de généreuses libéralités à son égard, en lui déclarant qu’il avait le pouvoir de guérir et de ressusciter.
Le fils du Roi, moribond, fut bientôt une occasion pour Sapor, de savoir si Manès possédait un si grand pouvoir. Mais ce fils des Mages, ce grand éclairé qu’était Manès, ne put malheureusement réduire la maladie de l’enfant. On prétend que son fils une fois décédé, Sapor condamna l’hérétique aux supplices. Toutefois cette circonstance ne nous semble pas trouver une quelconque justification, et il serait plus juste de supposer que le monarque accorda son pardon au « Messie » impuissant. On raconte d’ailleurs que Manès mourut, non sous Sapor, mais plutôt sous le règne de Varane II, et que longtemps encore il médita son opinion dualiste. Un grand nombre s’inspira en suite de sa doctrine, et ses disciples se multiplièrent fort rapidement. Ces derniers, plus vifs, et téméraires que Manès, eurent un grand succès, et s’en allèrent en Syrie, en Inde, en Egypte, dans toute la Perse, et plus particulièrement dans les contrées extrême-orientales. Quoi qu’ils honorassent fort leur maître Manès, ses disciples n’avaient point un respect profond et absolu de ses théories. Aussi, chacun d’eux modifiait à son goût la doctrine, et formait sa propre secte.
Toutes ces communautés devinrent ainsi rapidement nombreuses, et différentes les unes des autres. Théodoret en dénombre plus de 70, et suggèrent que ces sectes, par leur diversité et leurs opinions, s’accommodaient fort bien avec les divers Gnostiques de l’Antiquité. On suppose qu’elles finirent par se réunir, et qu’elles formèrent un conglomérat mouvant, et évolutif, capable de s’adapter à toutes les situations, toutes les pensées, toutes les nations. Il faut dire que le Manichéisme a la faculté d’absorber les doctrines qu’il rencontre sur son passage, et de les modifier à son gré. Quoi qu’il en soit, et pour revenir à notre sujet, cette religion trouva un adversaire redoutable en la personne des Empereurs Romains. Les Perses jouissaient en effet de peu d’estime chez les Romains, et le Manichéisme, issu de cette contrée ne pouvait qu’inspirer l’effroi aux Occidentaux. Les Empereurs trouvèrent cette doctrine odieuse, car ils soupçonnaient qu’elle vint de la religion des Mages. Aussi Dioclétien les persécuta, mais ne pouvant en toutes circonstances les différentier des Chrétiens, il n’épargna ni les uns, ni les autres. Depuis 285, jusqu’en 492, les Manichéens furent bannis, dépouillés de leur fortune, exécutés, suppliciés, et ce dans tout l’Empire. Les prescriptions les regardant sont d’ailleurs mentionnées dans le code Théodosien.
Saint Augustin les combattit sans relâche en Afrique, et malgré cela, ils ne cessèrent de se multiplier dans l’obscurité compacte des catacombes, et autres lieux secrets. L’Espagne, la Gaule, l’Arménie, l’Egypte, furent peuplés par les tenants de cette idée Dualiste, et vers le septième siècle, un prêcheur Manichéen nommé Gallinice envoya ses deux enfants, Paul et Jean, enseigner à un grand nombre de nations. Paul reçut plus particulièrement une large audience, et rendu puissant par ses succès, fonda la secte des Pauliciens.

Cette communauté connue une importance inespérée, mais comme en toutes choses qui atteignent la gloire, les dissensions ne tardèrent point. Certains de ses membres s’insurgèrent, et formèrent le projet de se libérer de la hiérarchie de la secte, et d’enseigner librement. Un schisme se fit donc, et l’on vit les hérétiques Sergius et Baanès s’entre déchirer et méditer une guerre sanglante. Mais leur aversion irrépréhensible pour la Croix, leur fit souvenir qu’il était infiniment plus profitable de briser les crucifix, et d’incendier les églises que de se porter préjudice, l’un l’autre. Aussi, enfin réconciliés, les Pauliciens trouvèrent éminemment attirante la doctrine des Sarrasins Mahométans. Emplis d’une affection débordante autant que soudaine, ils trouvèrent cause commune avec ces derniers, et se bâtirent des places fortes, des retraites, tout en luttant férocement contre l’Empereur de Byzance.

Vers le neuvième siècle enfin, les armées rassemblées de l’Empire Romain d’Orient, venues en Arménie, siège de l’hérésie, dispersèrent les Manichéens. Ceux-ci désorientés, et pour la grande majorité, se convertirent à l’Islam. C’est tout au moins ce que rapporte l’Abbé Bergier, théologien fort connu. L’autre part des Manichéens se réfugia en Bulgarie, Italie, en Lombardie, en France, et au douzième siècle trouve pour nom : Cathares, Hussites, Pétrobrusiens, Henriciens, Poplicains, Wicléfites (le communisme est issu de ces sectes de Manichéens qui étaient venus en Russie).

Bossuet s’est d’ailleurs beaucoup interrogé au sujet des Cathares, et ce dernier rattache très justement l’hérésie Albigeoise ou Cathariote au Manichéisme dont elle garde les traits profonds, et la fait naître en Orient, d’où elle serait passé de la Bulgarie et l’Italie jusqu’au Languedoc. Rien n’est moins sûr en ce qui concerne la marche de progression de la secte. Il faut d’ailleurs reconnaître que le Manichéisme, s’il est passé par l’Italie, et plus précisément la Lombardie, s’est d’abord propagé, via les voies commerciales, dans le nord de la France. Le processus de dispersion des idées, est donc opposé à celui qu’indique Bossuet. « C’est au nord de la France, écrit M. Pfister [Pfister, « Etudes sur le règne de Robert le Pieux », Paris, Wieweg, 1885, p. 326], que l’hérésie se propage d’abord ; c’est là que des documents nous la font découvrir en premier lieu ; du nord, elle a gagné le midi de notre pays, […] enfin seulement, à une époque postérieure, on la trouve en Dalmatie. »

Saint Bernard s’il n’ignorait point les agitations que les Manichéens suscitaient dans le midi de la France, s’adresse d’ailleurs plus particulièrement dans sa réfutation de l’hérésie à ceux du nord et de la région Champagne. Il convient aussi de noter que l’essentiel des informations dont il dispose ne vient pas du Languedoc, mais bien de la Flandre, des bords du Rhin, et des enquêtes réalisées à Cologne. En cela remarquons qu’une missive du prévôt de Steinfeld indiquait à Saint Bernard que depuis un certain temps les manigances d’une secte avaient été démasquées près de Cologne et que celle-ci œuvrait dans l’ombre depuis des temps reculés sans qu’avant on ait pu mettre la main dessus. Ces Manichéens s’étaient ensuite diffusés avec une incroyable facilité dans toutes les églises du nord et semblaient tenir pour origine Arras et Orléans, où l’on situait leur naissance au onzième siècle. Mais l’épicentre de l’activité, quoi qu’on en dise, était jusqu’alors identifié au château de Montwimer (en Champagne), dans le diocèse de Châlons. Et Dollinger, qui semble avoir bien étudié la question, a démontré avec beaucoup de persuasion, qu’il fallait entendre dans l’épître aux Liégeois, qu’il existait un château non loin de Châlons, peuplé d’un grand nombre de manichéens parmi les plus inquiétants.
Dans leurs rangs on pouvait distinguer un certain Fortunat, qui jouissait à ce que l’on en dit d’une grande estime (mais peut être s’agissait-il de leur patriarche ?). Quoi qu’il en soit, le diocèse de Châlons était pénétré de cette secte depuis déjà le neuvième siècle au moins. C’est en effet que dès 1075, des Cathares et autres Manichéens avaient été repérés puis brûlés par le peuple furieux à Cambrai, et que les malheureux sectaires étaient réputés venir déjà de Montwimer.
[Chronic. S. Andreae Cameracens, III, Ap. Mon. Germ. VII, 540] A la lumière de ces découvertes, on ne doutera plus de l’origine des Templiers. Ces derniers, élevés au rang d’ordre indépendant et autonome en Champagne par le concile de Troyes, se virent, bien plus tard, accusés par Philippe le Bel et les divers inquisiteurs de renier le symbole de la Croix et de pratiquer la sodomie par répugnance pour l’union des deux sexes. Or c’est justement l’un des traits caractéristiques du Catharisme et du Manichéisme. On sait par ailleurs que la Champagne était propice à l’hérésie et que cette opinion s’était élevée de cette contrée, aussi quoi qu’on en dise, il est notable que les Templiers tirent leur filiation, et ce de façon établie, depuis la Champagne, et depuis cette secte de Manichéens.

Les relations qu’eurent donc les Templiers avec la secte Islamique, mais anciennement Gnostique et Manichéenne du Vieux de la Montagne, ne peuvent en cela nous étonner. Ajoutons, que de ce château de Montwimer, autrement nommé Montaimé, le Manichéisme s’étendit jusqu’au Rhin, imprégna la Flandre, Liège, Trèves, Toul, le Soissonnais, et que même les Apostoliques de Bretagne lui doivent leur origine.

On pouvait compter dans le nombre des hérétiques, une multitude de tisserands, de clercs, de gens du peuple et de moines. La secte étant fort discrète, elle ne fut comprise et découverte qu’en 1144 où les ecclésiastiques de Liège s’aperçurent de l’ampleur de l’erreur, et la dénoncèrent au Pape Lucius II.
[Sur les hérétiques de Flandre et leur doctrine, il convient de consulter avec attention : continuat.
Proesmonstrat. Loc. cit. ep. Traject. Eccles. Ad. Trid. Episcopus. Sur ceux de Soissons et leur communauté, Guilbert de Novigento, Debita Sua, Liber III, cap. XVII. Sur ceux de Champagne et de Liège, ainsi que du nord Ep. Eccles. Leodiens. Ad Lucium Papa. Sur ceux de Cologne, Evervini. Epist. Ap. Migne, T. CLXXXII p. 676].

A2- Démantèlement analytique de l’hérésie Manichéenne
A- Aspect apparent de l’hérésie

Il semble, à ce que l’on rapporte, que chez les Cathares, autant que chez les Manichéens, le bien et le mal étaient des principes nécessaires, indépendants, et autonomes l’un de l’autre. Dieu n’était rien d’autre qu’un dieu, et ce dernier se trouvait confronté à une entité aussi puissante, si non plus que lui-même : le démon. On nomme cette opinion « Dualisme ».
Selon leurs enseignements, ces deux forces influaient profondément et de manière irrésistible sur la volonté humaine. Or le Manichéen ne doit point choisir l’une ou l’autre de ces forces, mais doit au contraire se soumettre à leurs influences car on considère que sa volonté propre est altérée, et qu’il est dépourvu de libre-arbitre. Aucune résistance au mal ne peut et ne saurait être utile ou profitable, car inopérante, et contraire à l’ordre des choses. De cela il ressort qu’aucune faute, ni péché, ni traîtrise ne peut lui être imputé.
(Artc her b franc xii). Aussi, le simple croyant (non le Parfait, mais le simple croyant) peut jurer, se parjurer, se rouler dans le vice, être couvert de crime et d’abjections, tout lui est et lui sera pardonné, car irresponsable de ses fautes, et contraint par les émanations bénéfiques ou maléfiques, il est l’instrument aveugle du péché. (art her p maur xlix)
En réalité le simple croyant est considéré comme un être dépourvu de conscience et de volonté propre. L’homme est l’émanation d’un corps collectif, qui englobe dans son existence toutes les possibilités d’existences. Le simple croyant ne peut ainsi être responsable de ses actes, car il porte en lui tous les actes, bons ou mauvais, de tous les hommes. Soulignons pour étayer notre propos que les Cathares ne faisaient d’ailleurs point mystère de ces idées : Le parfait Guilhem Bélibaste déclarait lors de l’une de ses inspirations suprêmes que « les croyants ordinaires ne doivent point craindre de se livrer à toutes les turpitudes, car ils doivent être persuadés que leurs péchés leur seront pardonnés à l’heure dernière par la réception du sacrement (consolamentum) ». [art. her. P. Maur., XXIII, Sermo. J. Aut. Fol. 251 C. G. Bélib.]

Le simple croyant :
Le simple croyant peut ainsi tuer des animaux, escroquer, voler, trafiquer, ne point suivre le carême, et se rouler dans la luxure, sans en ressentir le moindre mal, car, de toute façon, le consolamentum, au soir de sa vie, fera en sorte d’absoudre rétroactivement le coupable de ses fautes. (conf a sicredi) Mais cette doctrine trop conciliante et permissive aurait éveillé la méfiance des personnes instruites. Or le plus grand nombre de ceux formant les croyants Cathares se recrutait chez des personnes du peuple, issues des campagnes, des labours et n’avaient que peu d’instruction. Aussi, Saint Bernard ayant porté quelque temps son attention sur le sujet, déclare au regard de cette situation : « On ne les convainc pas par des raisons, ils ne peuvent les comprendre, elles leur demeurent inintelligibles. Aucune autorité ne les corrige, ils ne peuvent l’accepter, ni se soumettre. On ne peut les persuader, car leur cœur est dur et téméraire. Les dés sont jetés, ils aiment mieux mourir que de se convertir. Ce qui les attend, ce sont les flammes. » [Serm. LXVI n°2, Rusticani homines et idiotae] Parmi les simples croyants on comptait en outre un grand nombre de Texores, des tisserands, des marchands, qui étaient alors connus sous l’appellation d’Ariens, ou de Manichéens. On voyait en eux soit des disciples d’Arius, soit les successeurs des Mages Chaldéens. C’est de cette catégorie d’hérétiques que l’Abbé de Clairvaux, St Bernard, donne à grands traits un portrait : « Ils offrent le type de l’hypocrite effronté et malicieux. L’apostasie est le moindre de leur crimes, car ils sont des maniganceux débridés et des débauchés vulgaires, qui, déguisés en apôtres et sous le vêtement de l’agneau, sèment le désordre jusque dans les plus honnêtes familles. »

Le Parfait :
Le Parfait, lui, est homme de bien. Il se différencie du croyant par le sacrement du consolamentum, administré, non à l’article de la mort, mais après une période probatoire. On le qualifie de prêcheur, de prophète, et porte la caractéristique de se dire, comme Manès, fils du Saint Esprit, ou plus encore Christ et Apôtre. A ces derniers, il leur est défendu formellement de souiller leurs mains du sang d’un quelconque animal, si petit soit-il. Le vol ne doit point de même entacher leurs actes. (art her p maurini lviii) Toutefois, vivant d’aumônes, de dons, et d’offrandes, il leur arrivait de troquer des bénédictions et autres prières contre divers bienfaits matériels. Mais les Parfaits savaient fort bien se contenter de ce qu’on leur donnait, aussi jeûnaient-ils fort souvent.

Ils avaient pour habitudes de se faire à la semblance des Catholiques, et prenaient un goût certain à vivre parmi eux. Communier, bien qu’ils y répugnassent, leur était une occasion de moquerie, et certains emportaient avec eux l’hostie afin de s’exercer à quelques jeux. Les dimanches, les fêtes de l’Eglise, étaient de même suivis pour ne pas éveiller l’attention, ni la méfiance des catholiques. Toutefois, il leur était difficile de respecter les crucifix, aussi lorsqu’ils ne sentaient plus peser sur eux le regard des autres Chrétiens, et que les abbés étaient loin, il leur arrivait de ne plus pouvoir se contenir, et de briser les croix. Bélibaste déclara d’ailleurs un jour, avoir eu envie de briser avec une hache tous les crucifix qu’il trouvait sur son chemin. Ne pouvant le faire, « il les frappait et les insultait ». Mais les subterfuges étaient nombreux pour s’excuser d’avoir à se signer devant des Catholiques : « Lorsqu’un Parfait était contraint de faire le signe de croix pour ne point éveiller la méfiance, il était entendu parmi eux qu’il s’agissait de chasser les mouches de son visage. »
[Reinerius 1764, P. Garcias, Bonaccorsi 209, art. Her. P. Maur. XVII. Conf. A. Sicr. Fol. 127 B] « Un hérétique reconnu est beaucoup moins nuisible qu’un faux catholique. » [Serm. LXVI, n4, LXIV, n9, Serm. LXV, n8]

Les cathares Parfaits étaient de grands prêcheurs. L’improvisation, la tournure vive et novatrice de leurs expressions, l’ambiance toute mélancolique et pleine de mystères des lieux où se faisaient entendre leurs discours, tout concourait à exalter les fidèles et inciter à la conversion les auditeurs. Ajoutons, qu’encore tout emprunt de l’enthousiasme du sermon Cathare, il était alors fort facile pour le spectateur d’être admis dans la secte : On devenait Cathare ou Manichéen en écoutant religieusement prêcher l’orateur du jour, et par imposition des mains, le Parfait élevait la personne toute tremblante de respect à la dignité insigne de croyant. (Toutefois plus difficile était le sacerdoce cathare, autrement nommé état de Parfait ; aussi avant de devenir proprement « Cathare Parfait », il fallait plus d’une année de prostration et de patientes manigances en compagnie de ses supérieurs, pour qu’on puisse recevoir l’hérétication finale et devenir l’élu.) Quoi qu’il en soit, de l’avis des auditeurs, et suivant les documents qu’il nous reste de cette époque, les prêcheurs remportaient souvent un large succès et leurs sermons, quoi que peu d’entre eux nous soient retranscrit, laissaient voir la puissante rhétorique de leurs auteurs : Pierre Autier (Parfait) par exemple nous a laissé le texte de l’un de ses discours où il attaque avec précision l’Eucharistie, et où il dément à grands renforts de preuves, la présence du Seigneur dans les Saintes Espèces : « L’Eglise, dit-il, suppose avec grossièreté la présence de Jésus-Christ dans l’hostie. J’en veux pour preuve de cette impossibilité énorme et monstrueuse, que même si le corps du Christ avait été de la taille d’une montagne, ou encore de la taille d’une baleine, il y a fort longtemps que les prêtres l’auraient consommé tout entier ! »
Nous voyons bien qu’avec de tels raisonnements, les auditeurs ne pouvaient qu’être remués et émus jusqu’au cœur, et qu’ainsi, définitivement convaincus de la fausseté des principes de l’Eglise, ils ne pouvaient que se convertir au Manichéisme.

On sait par ailleurs, que les Parfaits rejetaient avec dédain le baptême, que ce dernier soit des enfants ou des adultes. L’Eucharistie, la communion des Saints, le respect dû aux morts, les prières pour ceux-ci, étaient en peu d’estime chez ces Cathares, et se voyaient remplacés par des rites dont on ne sait plus grand-chose. Ne disaient-ils pas entre eux : « Jure, parjure-toi, mais ne livre jamais le secret. » « Jura, perjura, secretum prodere noli » [In. Cant. Serm. LXV n 2]
Le secret fut en effet bien gardé, car il n’y a guère que la connaissance du sacrement du consolamentum qui nous soit parvenu. Ce que l’on sait toutefois de ce sacrement se résume à ceci, et nous éclaire singulièrement sur la véritable doctrine des Cathariotes et autres Manichéens : L’état de Parfait impliquait d’avoir préalablement reçu le sacrement du Consolamentum. Celui-ci avait des effets particulièrement curieux, notamment en ce qu’il condamnait l’union des deux sexes. De l’avis de certains, cette interdiction formelle reflétait ce que bien plus tard l’Eglise reconnut chez les Templiers comme une pratique orgiaque et satanique : On suppose en effet que les Templiers s’incitaient mutuellement à la sodomie par répugnance pour les femmes. Les Cathares furent de même soupçonnés, et ce bien avant les Templiers. (Quoi que nous n’ayons nullement de preuve sur ces affirmations, sans doute abusives) En outre, il y avait, jadis une formule que prononçaient les Parfaits en recevant avec ferveur le sacrement suprême : le texte est dans Reinerius Sacchoni :
« Je promets solennellement de me rendre à Dieu, de ne plus toucher une femme, de ne point tuer un animal, de ne manger ni viande, ni œuf, ni laitage, de ne me nourrir que de végétaux, et de ne point manger sans compagnon. »
(s’ils ne doivent point tuer un animal ni manger de sa chair, c’est qu’ils supposent probablement comme les Bouddhistes que leur âme se réincarnera dans la chair d’un animal.) Notons les extrêmes ressemblances : « Ne point manger sans compagnon » est à l’évidence l’un des préceptes les plus en vogue chez les Templiers, car ces derniers avaient pour habitude de souper avec leur frère d’armes, ce que l’on voit d’ailleurs nettement sur certains de leurs sceaux d’époque.
Prendre de même de la viande, ou de toute autre substance issue d’un animal, comme les œufs, le fromage, etc… était chez le cathare Parfait un crime inexpiable. Toucher le moindre de ces aliments n’était pas même permis.
Vie dure et austère, faite de pénitences et de privations, car selon les enseignements des Parfaits, le Christ avait jadis enseigné à ses disciples assemblés, que la chair des animaux était impure, et que les corps des bêtes contenaient des esprits soit déchus, soit réincarnés.
[Cf. A. Sicr., fol. 122 a, Reinerius.] Saint Bernard déclarait à ce sujet, et au regard de telles interdictions : « Pourquoi rejeter avec horreur le laitage et tout ce qui sort de la chair ? Vous limitez à votre gré et par respect pour l’opinion insensée de Manès, la grandeur et les bienfaits abondants de Dieu ; vous faites une distinction entre les choses qu’il a créées, et décidez que les unes sont immondes, au lieu de les recevoir toutes avec actions de grâces. Je ne loue pas votre abstinence, j’abhorre votre blasphème, et c’est vous que je proclame immondes. Car tout est pur pour les purs, a dit un excellent appréciateur des choses divines. [Serm. LXVI, n°6 et 7.] »
Notons toutefois, et par respect pour la vérité historique, que cette interdiction formelle de tuer, de se nourrir des animaux, et de prendre des laitages, ne touchait que les Parfaits, et le simple croyant avait toutes les libertés, n’ayant point été soumis aux obligations du Consolamentum.

En ce qui concerne les Parfaits il faut encore ajouter qu’ils respectaient le Carême. Mais non le Carême Catholique et Orthodoxe, car il y avait chez eux trois carêmes. L’un, celui de la saint Martin, le second le carême ordinaire, le troisième depuis la Pentecôte jusqu’à la fête de Jean-Baptiste. (sermo pr taverner fol 252, art heret p maur lv) Mais les croyant, une fois encore, ne suivaient d’ailleurs pas cette pratique, et on a déjà vu certains se goinfrer abondamment lors de tels jeûnes. Les disputes ne portent point au demeurant sur ce genre de rituels, qui, s’ils sont contraires au catholicisme, ne comportent point de funestes suites. C’est la conséquence directe du Consolamentum qui rebute l’Eglise Romaine : Si le simple croyant pouvait se rouler dans le stupre autant qu’il lui était loisible, une fois passé à l’état de Parfait, et une fois reçu le sacrement, il lui était formellement interdit de même toucher une femme. Le consolamentum renvoyait au néant le mariage, et le nouveau Parfait, devait renier son épouse et ses enfants, et tout ce qui faisait de lui un père. Mais, et contrairement à toute attente, il s’attachait ensuite à une autre femme, et les deux chastes personnes, cohabitaient ainsi dans tous les aspects de la vie (avec cette réserve, qu’ils ne devaient point se toucher). (art here p maur xxxviii conf a sicr fol 128b) Ne rêvons point, les derniers Parfaits qui nous sont connus dans la réalité de leurs actes, et s’ils affichaient une telle conduite, sont aussi connus pour avoir eu plusieurs enfants illégitimes. Une telle conduite, et de tels préceptes ne pouvaient qu’éveiller l’attention de Saint Bernard, et ce dernier révolté déclarait à ce sujet : « Il faut être bestial, et immonde pour ne pas s’apercevoir que renier les justes noces, c’est donner une force nouvelle à toutes sortes d’impudicités ! Ecoutez donc Saint Paul qui autorise ces unions, ces noces subtiles. Si vous prohibez ce que Saint Paul recommande, votre prohibition ne me convainc que d’une chose, c’est que vous êtes apostats ! » [Serm. LXVI, n°4 et 5].
Le Saint ajoutait ce discours concernant la cohabitation du parfait avec cette femme qui l’accompagnait partout :
« Dites-moi, prêcheur, quelle est cette femme que je vois près de vous ? Est-ce votre épouse ? Vous répondez que non et vous niez, car votre engagement s’y oppose. Est-ce donc votre fille ? Vous dites non encore, et toujours vous niez. S’agirait-il d’une parente ? Nullement. Mais alors, votre vertu est-elle en sûreté dans une telle compagnie ? Etre toujours en compagnie d’une femme et ne pas pécher, est plus merveilleux que de ressusciter un mort. Et vous voulez que je croie à votre vertu ! »

Liturgie des Cathares:
Le canon Cathariote contient en réalité fort peu de livres religieux. Il est principalement composé du début de l’évangile de Saint Jean et de certains épîtres. Les Cathares rejettent d’ailleurs tout l’Ancien Testament et Il faut souligner que toutes les autres Ecritures en usage dans l’Eglise Romaine et recommandées par cette dernière sont par eux réputées diaboliques. Quant à Moïse, il fait l’objet d’une haine particulière, car on le dit démon nocturne, père du vice, et fils de lucifer. Mais il semble même que leur version de Saint Jean présentait d’étranges caractéristiques et peut-on dire toutes les marques d’une vieille hérésie gnostique. On peut à ce titre, consulter dans les archives de Carcassonne un faux Evangile de Saint Jean en usage chez certains gnostiques, et qui était fort apprécié des Cathares, mais seulement dans les
derniers temps de l’hérésie, car on suppose qu’un autre livre, plus étrange encore était antérieurement en grand honneur chez eux. Notons que le parfait Guilhem Bélibaste, qui n’aimait guère l’Ancien Testament, n’avait aussi pas plus d’estime pour les évangiles : « Je n’ai que du mépris pour les Evangélistes, et j’affirme avoir autant, sinon plus de pouvoir que les apôtres eux-mêmes et que le fils de Marie. [Reinerius, col. 1773.]

Bélibaste et les autres Parfaits se revendiquaient ainsi d’une filiation Christique. Nul ne pouvait les contredire, ni mettre en débat leur parole, car ils prétendaient tenir du Christ lui-même leur science et leurs préceptes. Selon leurs enseignements, le Christ en personne avait, dans un grand secret, écrit un « épître aux Cathares ». L’Epître aux Romains, quant à lui, ainsi que l’Ancien Testament, étaient selon l’avis commun, « promulgués par le diable » [Sermo. Jac. Auterii., fol. 251 D]
On préférait alors aux écrits Romains, et au Bréviaire, le « Rituel Cathare », sorte de liturgie authentiquement manichéenne.
Ajoutons, et pour finir cet exposé, qu’on prétendait au sein de la haute hiérarchie de la secte, détenir une écriture mystérieuse possédée par les seuls Maîtres. De quoi s’agit-il ? Nul ne le sait désormais…

B- Sur le fond de l’hérésie

Selon l’historien Dollinger [Ouv. Cit. p. 80], « les Parfaits Cathares ne dévoilaient aux simples croyants que la partie exotérique du manichéisme, réservant la substance ultime aux principaux initiés et maîtres. » Aussi, tout ce que nous avons vu précédemment ne résulte que de l’apparence des choses. La véritable doctrine Manichéenne, n’étant en réalité, que la religion des Mages Chaldéens. Voici ce que nous pouvons affirmer : Dieu n’est pour eux qu’une puissance bornée et non absolue. Il se voit opposer une essence diabolique, qui préexiste à la création, lors qu’il n’y avait encore aucun être auquel le mal puisse nuire. Dieu, selon leur dire, est une lumière sise dans une région séparée de celle du mal, dont on prétend que cette dernière est couverte de ténèbres. (conf archelaus, n 21 et suiv) Aussi dans le système de Manès, les deux principes, le bénéfique, et le maléfique, agissent en s’opposant et sont inconciliables, car on ne sait en fait lequel préexista et tient prééminence dés l’origine sur l’autre. Dieu est de même chez eux impuissant, injuste, craintif, et incapable tant de domination, que de prévoyance en quelque situation que ce soit. Il se borne à régner sur la région qui lui est impartie, et s’abrite dans cet espace comme on se réfugie derrière les hautes murailles d’une forteresse. Ainsi la puissance de la lumière se retranche dans sa région comme si elle faisait l’objet de quelque entreprise funeste, ou d’un siège, et que ses ennemis la cernaient de toutes parts. Le mal, lui, est autonome, sans crainte, paré de la puissance, et armé de la sagesse et de la perfidie.
Au demeurant, le décor, nous le voyons bien, n’inspire que la méfiance, et laisse planer un doute sur les capacités du bien à assurer la sauvegarde de ses intérêts. D’ailleurs, les Manichéens n’enseignaient-ils pas que ces deux régions (celle du démon et celle de Dieu), séparées éternellement par une barrière infranchissable, s’étaient jadis menacées, et que Dieu, effrayé par le démon, avait abandonné à celui-ci une partie des âmes, afin de mieux préserver les autres. Le bien dispose donc de façon injuste des êtres, car impuissant devant l’immensité du mal, il ne peut que céder, ou lutter sans certitude de victoire.
(St Aug, de morib manich, c, 12). Les Manichéens enseignent encore que les corps ont été formés par la puissance maléfique, et que les esprits viennent du bien. L’esprit est ainsi une émanation partielle de l’entité Divine, une fraction de lumière échappée de la région où siége la puissance de Dieu, alors que le corps, formé du démon, et séparé éternellement de l’esprit, ne peut que lui nuire, et n’admettra jamais d’être dominé par lui, car au moins égal à ce dernier, il a libre choix d’influer selon sa volonté sur la destinée de l’homme.
Aussi dans ce système Manichéen en Diable, et selon l’abbé Bergier, « toute religion est inutile, est absurde, car nous ne pouvons rien espérer de notre piété et de nos vertus, et nous n’avons rien à craindre pour nos crimes. Quoi que nous fassions, le dieu bon nous sera toujours propice, et le mauvais principe nous sera toujours hostile. Tous deux agissent nécessairement selon l’inclinaison de leur nature, et de toute l’étendue de leurs forces ; tout est donc la suite de la fatalité, il n’y a plus ni bien, ni mal moral, il n’y a plus que bonheur et malheur. » Le Manichéen en conséquence ne choisit point entre l’une ou l’autre de ces forces, il subit, et s’incline devant l’enchaînement de l’ordre des choses, et suit ce que le bien et le mal lui dictent à tour de rôle. C’est une doctrine de déresponsabilisation de l’individu, dont le libre-arbitre est nié, ou n’est même sensé ne jamais avoir existé. (n 24, 25 , 26, St Aug, de morib manich, c et confér d’Archél n 20.)
C’est tout au moins ce que l’on peut récolter officiellement sur la doctrine Cathariote et manichéenne….
Mais il est une troisième voie méconnue, jadis enseignée par les Mages Chaldéens, et dont la Bible nous a mise en garde par bien des moyens et depuis l’origine des temps: Comme nous l’avons souligné précédemment, le Manichéen ne doit point choisir entre le bien et le mal, car étant l’instrument aveugle de ces deux puissances, il ne lui appartient pas de se soustraire à leur autorité. Toutefois c’est là justement, déclaraient les Mages, que se situe la troisième voie, celle qui libère le sujet, l’homme, de ce choix impossible : Le bien est faible, craintif, objet de la peur, et de la contrainte du Mal. Le mal, lui, est couvert de puissance, d’habileté, détient la sagesse et la perfidie. Aussi ce dernier peut franchir, ou simplement menacer de franchir la barrière éternelle qui sépare la région de lumière, de Dieu, de celle des ténèbres, du démon, et contraindre par là le bien, à lui céder les âmes. Il est donc infiniment plus profitable, déclaraient les Mages, de ne point se soustraire à l’influence de l’un ou de l’autre principe, mais de chercher à opérer
une conjonction entre ces deux forces. Comme Dieu ne peut vaincre le démon, ni même l’obliger à rester dans la région des ténèbres, et que chacun de nous appartient aussi au mal par son corps, et par toutes les influences qu’il reçoit de cette puissance, il convient donc de faire en sorte de conserver les avantages du Bien (mais par le MAL et pour Le Mal), en récoltant de même ceux du mal. Pour ce faire, les Mages avaient inventé la conjonction baptismale. Celle-ci consiste à admettre que le Bien surpris et tenté par le mal, (c’est en fait simplement le résumé de la chute originelle, et de la tentation d’Adam par Eve.) peut par son infléchissement, et sa soumission à ce dernier principe, opérer une conjonction, une troisième voie, seule capable d’unir les avantages de l’un et de l’autre.
Le raisonnement est ici le suivant : L’idée que nous nous faisons du mal (qu’il est le mal), provient du fait que cette puissance est en guerre avec Dieu, et que ces deux forces s’opposent en ne se conciliant point. Or, si le bien, (qui parait d’ailleurs à leurs yeux déjà s’incliner face au mal), cède en suprématie devant le mal, il est d’avis que la guerre que se font les deux principes cessera, et que le démon, bien que devenu omnipotent, aura ainsi concouru à la paix, et qu’enfin par cette paix, le mal contiendra forcément le bien, car s’il n’y a plus dans l’univers que le Mal, non seulement on peut supposer que tout conflit en est absent, mais encore, que le mauvais principe a absorbé dans sa structure tous les éléments du Bien.
Le résultat se nomme en physique : Le Néant ou le Rien, qu’on qualifie de même « abîme de désolation ». Car il s’agit de l’abdication du Bien, et de son principal effet : l’existence. Le Dieu de l’ancien Testament ne disait-il point, « Je Suis, je Suis est mon nom » ! Dieu, est le principe de vie, or, se soumettant au mal, et pourrait-on dire, admettant d’être décapité par celui-ci, il perd non seulement la suprématie, mais supprime par là et par lui, toutes formes de vie. En soit, c’est une forme de Paix et d’Egalité suprême. Car il n’y a plus, ni lutte, ni injustices. Aussi le Bien (à ce qu’en disent les Mages) est le biais pour parvenir au Mal, et le conflit et la lutte ne peut être qu’un phénomène temporaire, dont il faut se soustraire par la troisième voie. Celle que nous avons exposée…
Comme nous pouvons le constater, cette doctrine religieuse lorsqu ‘elle se métamorphose en puissance politique ne peut qu’aboutir à ce que l’on pressent : le Communisme Stalinien. La lutte des classes remplaçant la lutte du Bien contre le Mal, et s’achevant par la victoire des classes populaires. On connaît la suite : 100.000.000 de morts…..
Mais la doctrine ne veut-elle point que tout se solde par le Néant et que la paix soit ainsi faite ????

C- Réfutation de l’hérésie

L’hérésie se réfute par la Théophysique, qui est la science exacte de l’Eglise Romaine. Il y a en effet trois aspects de la religion Catholique : Le premier, l’enseignement ou catéchèse des prêtres, le second, la connaissance ésotérique des textes Bibliques, et la science Patristique. Le troisième enfin, le niveau hors classe, qui se nomme Théophysique. Or, la Théophysique est la science physique de Dieu, celle qui explique l’inexplicable par la mathématique, et qui fut donnée par Dieu à Moise sur le mont Sinaï.
Voici donc ce que déclare la Théophysique à ce propos :
Un seul Dieu tout puissant a créé toutes choses. « C’est moi qui donne la vie et la mort, qui frappe et qui guéris. (Deutéronome c, 32 v 39) » « C’est moi qui ai créé la lumière et les ténèbres, qui donne la paix et qui créé le mal. (c 45 v 7 Isaïe) » « C’est vous seigneur qui affligez et qui sauvez, qui conduisez au tombeau et qui en retirez. (C 13 V 2 Tobie).
C’est la réfutation totale de tout Dualisme. Dieu est pour part fait de Bien, et pour part fait de Mal, aussi le démon ne peut qu’être une déviation momentanée et non une puissance autonome. Qu’est-ce à dire au juste ? La Bible ne déclare point en cela que Dieu contienne une part véritable de Mal, elle souligne juste que l’un des éléments constitutifs de Dieu, pris séparément est le Mal. Autrement dit, Dieu est le prototype de l’être Parfait, qui ne peut être surpris, ni trompé car regardant vers l’arrière et vers l’avant ; omnipotent et symétrique, il supplante le Mal, et en fait une partie constitutive du Bien.
Aussi, et pour ne point rentrer dans de fastidieuses démonstrations de Mathématiques, qui ne pourraient d’ailleurs être comprises sans de plus amples explications, il convient de prendre un simple exemple : Dieu déclare à Moise : « Je Suis celui qui Suis ! » Dieu donc, « est », « suis », « demeure ». C’est une expression vivante de l’existence. Mais comment exister, et démonter que l’on existe ? Prenons l’exemple d’un tableau de Raphaël : Ce tableau est unique est irremplaçable parce qu’il n’est pas de même nature que les autres. Tout le différencie des œuvres d’art présentes autour de lui. Car il ne possède pas le même auteur, ni la même couleur, ni la même facture, etc… Mais si tous les autres tableaux n’avaient pas été créés, ni mis en œuvres, et n’existaient pas, non seulement on ne pourrait concrètement dire qu’il s’agit d’un tableau de Raphaël, mais on serait dans l’incapacité même de jeter un mot pour désigner cet objet. On le qualifierait alors, de chose… et on ne se poserait pas même de question sur l’auteur, ne sachant ce que c’est, ni quel en est l’usage. Ainsi pour que le tableau de Raphaël existe, et qu’on le reconnaisse pour tel, il convient que tous les autres tableaux soient. Nous sommes donc face à un problème de définition, or ce qui n’est pas définit n’existe pas. Les romains, avaient d’ailleurs à ce sujet une excellente maxime : « Rien de ce qui ne peut être prouvé, n’existe ! » Donc pour que le tableau de Raphaël puisse faire l’objet d’une attention particulière, il demeure impératif que d’autres auteurs aient créé un certain nombre d’œuvres similaires, mais non identiques. Il ressort de cela, que l’existence de tous les autres tableaux est participante de la propre définition de celui de Raphaël ! Une chose ne peut donc être nommée, ni exister, sans que toutes les choses différentes d’elle ne « soient », existent de même. (Notons que « toutes les choses » différentes sont exprimées par « Tout », et non « Tout - 1 » car une existence est définie par son opposé, c'est-à-dire « Rien et Tout » à la fois.) C’est un phénomène d’interdépendance physique qui explique « l’existence », et le besoin que nous avons d’aimer, d’attirer l’autre à soi. Dieu, est ainsi « lui-même » et « les autres », « le bien » et « le mal ». Ajoutons que Newton l’avait fort bien compris, car il enseignait jadis dans sa théorie de « l’attraction universelle », qu’un corps attirait les autres corps à lui, en fonction de son volume et de sa densité (c'est-à-dire en fonction de son degré d’existence). Nous voyons en cela que plus le corps est évolué et important, plus il lui est nécessaire « d’expliquer » sa propre existence par la présence d’autres corps différents de lui.
Mais allons plus loin dans la compréhension de l’affaire, car nous voyons bien que « le mal » lorsqu’il est uni et sert Dieu, participe de sa propre existence, et ne peut donc être nommé à proprement parler, « Mal ». Aussi Qu’est ce donc « le mal » seul, ou plutôt à quoi correspond cette partie de Dieu qui participe du Bien, et que l’on nomme « mal » lorsqu’elle se trouve seule ?
Reprenons notre exemple du tableau de Raphaël : Celui-ci n’existe que si les autres tableaux sont reconnus aussi pour ce qu’ils sont. Mais si nous prenons « seulement » tous les autres tableaux dans leur « collectivité », et que nous « ignorons volontairement » chacun d’eux en particulier, leur déniant le fait qu’ils puissent être différents les uns des autres, nous obtenons le résultat suivant : il n’y a rien, absolument rien, car nous les considérons donc comme exactement semblables entre eux. Etant parfaitement « Egaux », on ne peut placer même un mot ou un nom dessus : ils ont la même couleur, taille, dimension, auteur, date. Ils ne sont rien que le néant… Or le Néant est ce qui n’existe pas, c'est-à-dire le Mal absolu. (Un démon est une entité collective non complètement terminée, un esprit en cours de réintégration dans le néant.) L’un des éléments constitutifs de Dieu est donc le mal, lorsque celui-ci est séparé de son opposé, de son autre moitié. Autre exemple : On dit généralement de Dieu qu’il est un Maître de justice, et à raison. Or la justice pèse les erreurs de chacun. Car si nous comparons Dieu à une balance de pesée munie de deux plateaux, nous constatons que ces deux plateaux sont unis par un lien d’interdépendance. Ils ne peuvent peser, justement, s’ils ne sont mis en rapport l’un l’autre. Voici le bien uni au mal. Maintenant, si vous retirez l’un des plateaux, comment pèserez-vous ce que vous désiriez mettre dans la balance ? Vous ne pourrez le faire, et le plateau unique dont vous disposez ne vous sera d’aucune utilité. Voici le Mal seul.
Une dernière chose : pourquoi le Monde, qui est mauvais, a-t-il été créé par Dieu ? Dieu ne fait rien de mal, il crée, et cela de façon toujours positive. Mais faut-il encore savoir que le mal, selon St Augustin, est la privation d’un plus grand bien, ou d’une existence plus Parfaite, ou de l’existence simplement. Or donc si Dieu a créé le Monde, il peut avoir projeté peu de bien en celui-ci ! Et le mal que nous ressentons, n’est que le fait de cette impression qui veut que nous puissions espérer un plus grand bien prés du Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob (le Christ simplement). Car nous ne sommes point du monde, étant les fils du Dieu Grand.
Quoiqu’il en soit, ce qui est exposé ici ne saurait tenir compte de Théophysique à proprement parler, mais plutôt d’exemple de Théophysique car les mystères sont nombreux dans le monde de Dieu !

Source : www.france-secret.com/cathares_art.htm